Ma fille est sur le point d’avoir 3 ans, d’ici 2 petits mois. Sur le plan de la santé, je ne peux pas dire que tout soit parfait, mais je pense qu’elle se situe dans la moyenne générale. Si on relativise et qu’on passe outre les quelques soucis de sensibilité au lactose dont ont découlé de nombreuses infections, bénignes mais récurrentes. Je reviendrai peut-être dessus à l’occasion.
Bref, jamais de grosse blessure, de grosse maladie, de diagnostic angoissant. Une gamine malade mais raisonnablement, qui ne fait pas mentir Murphy mais reste plutôt bienveillante pour les nerfs de ses parents.
Jusqu’à lundi. Reprise de travail pour tout le monde excepté Monsieur qui avait droit à une journée de rab inattendue et bienvenue. Qui tombait à merveille, la miss devant aller à la garderie, moi au boulot, il voyait se profiler avec délectation quelques heures rien qu’à lui qu’il savait déjà très bien comment remplir. C’était sans compter l’esprit de contradiction de sa fille (pas question que ce soit la mienne pour ça hein?) et ce fameux Murphy, qui ont décidé qu’une bonne poussée de fièvre pendant la nuit et le matin, c’était sympa aussi…
Exit la garderie, j’ai donc laissé la petite malade aux bons soins de son père et suis partie travailler sans inquiétude mais en prenant des nouvelles.
A midi, appel de mon homme. Prenant énormément sur lui. M’expliquant qu’elle avait toujours de la fièvre, que comme bien souvent avant la sieste il lui a fait couler un bain, histoire de lui faire du bien. Et qu’elle avait fait une crise. De convulsions/tétanie, figée, cambrée en arrière, yeux révulsés, lèvres violettes, et surtout arrêtant de respirer. Il l’a sortie, a réussi à lui permettre de respirer à nouveau, tout en appelant le 15. Et là tout s’est enchaîné très vite. Il attendait les pompiers en m’appelant, j’ai tout laissé en plan au boulot, je suis rentrée dare dare. Mon coeur a manqué de nombreux battements quand j’ai vu le camion des pompiers tous flashs dehors garé devant la maison. J’ai encore eu quelques hoquets en passant la porte, en trouvant 3 pompiers en communication avec le médecin régulateur, ma fille hurlante et impossible à calmer. Et de suite l’information est tombée: il faut l’emmener aux urgences pédiatriques. C’est le « protocole », il n’y a rien de fondamentalement inquiétant, elle va mieux semble-t-il mais il faut l’emmener quand même. Non pas de paracétamol, juste un petit pull, on y va. Madame, vous nous suivez le temps de rassembler quelques affaires.
Là, j’ai vraiment eu l’impression de perdre pied. Je savais ma fille dans les bras de son père, en sécurité. Mais je l’imaginais aussi dans ce camion toutes sirènes dehors. Je me demandais comment ça allait se passer là-bas. Je ne comprenais pas vraiment pourquoi on y allait, puisque ça semblait « peu inquiétant », mais une partie de moi avait furieusement besoin d’être rassurée.
J’ai réussi à me focaliser sur la route pour traverser la moitié de la ville, et je n’ai plutôt fièrement perdu mes nerfs qu’au moment où il a fallu trouver une place inexistante dans un parking ridiculement petit pour la taille du lieu, avec des travaux partout, des indications nulle part et tout le monde qui klaxonnait. J’ai fini par planter la voiture au sommet d’un talus, couru, pesté environ 10 fois parce que je ne savais pas où entrer. Pour finir par arriver dans la salle d’attente, et découvrir mon homme avec ma fille à moitié endormie dans les bras. Me disant que ben….il fallait attendre.
Quoi??? Mais quand on arrive avec les pompiers on passe direct, non??
Non Madame. Environ la moitié de ces enfants sont arrivés avec les pompiers. Vous ferez le circuit habituel. Et attendrez comme tout le monde. Et vous avez vu les tableaux? Environ 2H30 d’attente pour une consultation de médecine générale. Et éteignez vos portables s’il vous plaît.
Je suis ressortie aussi sec. Ma médecin traitante était absente pour la semaine (Murphy, Murphy). La pédiatre de ma fille n’arrivait qu’à 14H. Ca nous laissait 1heure pour prendre la délicieuse température de la salle d’attente, et nous faire une idée.
Premier passage avec l’infirmière. Interrogatoire, prise de tension….Explications. Elle ne dit rien, tout juste sympathique. Nous explique que quand même, il ne faut pas hésiter à donner du Doliprane (on va dire que c’est ma sensibilité de mère inquiète qui y a senti une accusation sous-jacente du type « vous ne soignez pas votre fille »). Qu’un bain, ça se donne exactement 0,5 degrés en-dessous de la température corporelle de l’enfant au moment où on l’y plonge (mon médecin m’a, depuis, donné 1 degré à 1,5 degrés comme indication, faites votre choix)….
Retournez vous asseoir. Un médecin vous appellera.
A ce moment-là, j’ai senti que ok, ce n’était pas si grave que ça. Sinon on serait vraiment passés devant tout le monde. On ne nous laisserait pas ici….J’espérais sincèrement atteindre ma pédiatre, et pouvoir partir, parce que vraiment ça commençait à virer à du n’importe quoi.
14H, Monsieur arrive à appeler la pédiatre. Qui est tellement débordée qu’elle ne peut absolument pas nous recevoir. Elle l’écoute attentivement. Prend le temps de le rassurer. Ce genre de crise arrive « fréquemment ». 1 minute, ce n’est vraiment pas long. Il a fait exactement ce qu’il fallait. Mais elle lui conseille de rester. Les médecins voudront peut-être lui faire une prise de sang histoire de s’assurer que tout est ok pour elle. On se consulte brièvement, mon côté spontané n’a qu’une envie, fuir très loin, mon côté cartésien raisonne en disant que quand même, la parole d’un médecin serait rassurante.
Sachez-le, écoutez toujours votre instinct maternel. Franchement. Après une attente de 2 heures supplémentaires, un énième réveil de notre fille qui n’espère visiblement qu’une chose, dormir tranquillement dans son lit, on est enfin reçus. Par un petit jeune qui doit avoir moitié moins que mon âge. Si je laissais parler la maman agacée que j’étais, je dirais qu’il n’avait même pas fini ses études. Qu’il cherchait ses questions qu’il répétait en boucle. Qu’il a absolument voulu regarder la gorge de notre fille qui refusait catégoriquement et hurlait de plus belle. Qui a mis 3 minutes à ausculter ses oreilles. Et bloquait sur le « pourquoi elle peut avoir de la fièvre » là où la seule chose qu’on voulait savoir, c’est si ce genre de crise était normale, inquiétante, comment les prévenir, comment réagir…Pas une seule réponse cohérente. On a dû répéter 3 fois que NON elle n’avait pas été en contact avec des enfants ou adultes malades, et que non on n’avait aucune idée du pourquoi la fièvre (on s’en fiiiiiiiiiche). La prise de sang? Il ne l’a même pas évoquée, et je me suis bien gardée de le faire. Pas question que ce petit jeune essaie de trouver une veine dans le bras de ma fille!
Tout ça pour s’entendre dire « très bien, je vais en référer à mes supérieurs, je reviendrai vers vous ».
Alors voilà. Je SAIS. Je SAIS que la situation hospitalière française est catastrophique aussi bien sur les moyens humains que financiers. Je sais qu’il y a des protocoles à suivre qu’il ne faut pas négliger: une infirmière ne peut en aucun cas répondre « oui » à notre question « peut-on partir si on le souhaite », ne peut en aucun cas nous donner un avis sur la gravité ou non du problème. Je SAIS que plus on attend aux urgences, moins c’est inquiétant, et qu’il vaut mieux terminer une journée, comme nous, après y avoir passé 5 heures plutôt que de griller tout le monde à peine arrivés. Je SAIS que ces petits jeunes doivent bien se faire une expérience (on ne veut juste pas que ce soit sur nos gamins), et qu’ils essaient de faire du mieux qu’ils peuvent compte tenu du stress que ça doit représenter de se retrouver confrontés à des parents inquiets, parfois pas cohérents, stressés, agacés par l’attente…Que leurs responsables sont eux-mêmes débordés et ont autre chose de plus important à faire (sauver des vies) que d’écouter des compte rendus sur la blondinette qui a pris un bain trop chaud avec sa fièvre, la brunette qui a sa gastro et la rouquine qui a des boutons de varicelle partout. Que la plupart des parents qui viennent aux urgences viennent pour voir un médecin, et qu’ils ne peuvent pas entendre une réponse comme « vous n’avez rien à faire ici, retournez chez vous, prenez rendez-vous chez votre médecin/pédiatre » (vraiment pas de bol, nous on n’attendait que ce genre de phrase!!)
Réponse qu’on a fini par me faire, c’est bien le comble!! Quand au bout d’une heure supplémentaire d’attente, j’ai interpellé une gentille interne en lui demandant si elle pouvait se renseigner au sujet de notre dossier, parce que ça faisait 3 fois que notre fille se rendormait et que vraiment, on voulait aller la coucher dans son lit. Elle nous a très aimablement (sans aucun second degré) répondu qu’elle allait faire du mieux qu’elle pouvait. Mais vous savez Madame, c’est ça les urgences, si vous ne voulez pas attendre, il faut contacter votre médecin traitant ou votre pédiatre.
Et là, avec tout mon calme parce que je savais qu’elle n’avait pas à prendre pour les autres, je lui ai répondu: « Mais je suis entièrement d’accord avec vous. On n’a pas demandé à venir. On ne voulait même pas forcément. Ce sont les pompiers qui ont pris cette décision ».
Elle a ouvert de grands yeux étonnés. Et moi, j’ai été partagée entre une forme de satisfaction de l’avoir prise à contre-pied, et le désespoir de voir que oui, ça coince bien quelque part…Et si en effet je devais désigner un « responsable » de cette mascarade, ce serait le médecin régulateur. Qui a pris la décision de nous envoyer aux urgences. Là où il aurait dû, sans aucun doute, prendre la responsabilité de nous conseiller de rester au calme. De prendre un rendez-vous dès que possible, dans la journée, auprès d’un médecin. Quitte à nous parler, à nous. Nous expliquer.
Pourquoi il ne l’a pas fait? Je l’ignore. Est-ce une histoire de personne, ou de protocole à nouveau, je l’ignore aussi. Je constate juste que si ça se passe systématiquement ainsi, comment peut-on alléger les urgences, garder les cas réellement graves, entre l’excès de zèle des régulateurs et les personnes qui ne savent pas vers qui se tourner?
Le bilan de cette journée? Une énorme angoisse. Surtout pour mon homme qui a littéralement vu sa fille arrêter de respirer dans ses bras, et devenir violette.
5 heures d’attente ou pas loin, tout ça pour….une ordonnance de paracétamol!! Et un gamin qui nous explique quel comportement adopter en cas de fièvre. Et qui conclut très gentiment « si ça ne va pas mieux, n’hésitez surtout pas à revenir »….
Une impression d’énorme gaspillage. D’épuisement inutile. Outre l’aspect nerveux et moral pour nous trois, la sensation que ma fille aurait sans doute bien mieux récupéré dans son environnement, sans affolement et avec ses parents tranquilles autour d’elle…
Elle? Elle se porte comme un charme. Elle a digéré ça bien plus vite que nous, sans nul doute. Elle a refait un peu de fièvre la nuit suivante. J’ai dormi avec elle, trop inquiète encore pour ne pas entendre sa respiration. J’ai été une bonne élève, je lui ai très vite donné du paracétamol.
Le lendemain, on a cocooné tous les trois ensemble, le plus tranquillement possible.
Aujourd’hui, elle est allée à la garderie, elle courait partout, elle a débordé d’énergie….
Faites des gosses…..

Quelle « aventure »… Je n’ose qu’à peine imaginer ce qu’à vécu ton amoureux ! Et vous trois, avec les pompiers, les urgences… Raisonnablement, il vaut mieux 5 heures aux Urgences pour une ordonnance de paracétamol que rester chez soi dans le doute. Mais il y a de quoi prendre le système en grippe, c’est certain. Des bises à vous trois !
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@Lizly: je pense qu’on ne serait pas restés chez nous, on aurait trouvé un médecin, quel qu’il soit. Mais il est certain qu’il vaut mieux 5H aux urgences et en ressortir que passer tout droit…Et il ne s’agit pas de prendre le système en grippe, mais bien de se demander comment on pourrait le changer, c’est ça le souci….
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Misère…
De notre côté on s’est très vite rendu compte qu’avec SOS médecins c’était pareil que vous avec les pompiers, si c’est un jeune enfant ils envoient très (trop !) facilement aux urgences pédiatriques.
Mais le week-end, il est impossible d’avoir un rendez-vous ailleurs qu’à SOS médecins.
(Et dites, sur les 5 heures, ils lui ont donné à manger et à boire ? Ou bien vous aviez pensé à prendre de quoi ? Nous, la première fois, on n’avait rien pris, et on s’en est très vite mordu les doigts… Depuis je sais exactement quoi mettre dans un « sac à urgences pédiatriques ».)
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@Anna Musarde: ben ça s’appelle la technique du parapluie…Se protéger à tout prix d’éventuelles erreurs ou retombées en prenant trop de précautions…Je comprends, et désapprouve en même temps.
Alors non, ils ne lui ont rien donné ni à manger ni à boire, vu qu’on était en salle d’attente. Heureusement j’avais en effet pensé à prendre un bib d’eau vu qu’elle l’a souvent réclamé. Par contre vu son état, elle n’avait pas faim du tout et dormait à moitié tout le temps donc le problème de la nourriture ne s’est pas posé, heureusement d’ailleurs…J’espère qu’il n’y aura pas de prochaine fois, mais tu as raison, des compotes ou craquottes, ça peut rejoindre le « à prendre dans le sac »….
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